Inde : des tribus sont confrontées au harcèlement et à l'expulsion au nom de 'la protection des tigres'
22 Mai 2014
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Survival a reçu d’inquiétants rapports affirmant que plusieurs villages tribaux sont menacés d’expulsion imminente des réserves de tigres dans l’état d’Odisha, dans l’est de l’Inde, en dépit de l’appel désespéré des villageois pour rester sur leurs terres et participer à la protection de la forêt.
Un témoignage recueilli par Survival indique que les tribus de la Réserve de Similipal sont confrontées depuis des années au harcèlement des gardes forestiers qui veulent les forcer à quitter la réserve alors qu’elles sont déterminées à rester sur leurs terres et vivent avec la faune sauvage depuis des générations.
Un munda de Jamunagarh, l’un des villages menacés d’expulsion, a déclaré à Survival : ‘Nous dépendons étroitement de la forêt… Nous n’avons aucun problème avec la faune. Nous ne chassons pas et n’abattons pas les arbres. Si nous partons, nous ferons face à de nombreuses difficultés… Je vous en prie, ne nous déplacez pas!’
Dans ce qui constitue une violation potentielle de la loi, les autorités responsables de la faune de l’état d’Odisha sont déterminés à faire disparaître tout habitat humain de la ‘zone essentielle’ des réserves de tigres. Trois des six villages ont déjà été déplacés de Similipal et des projets d’expulsion sont actuellement en cours dans la réserve de tigres voisine de Satkosia.
Au cours de la plus récente expulsion de Similipal, en décembre 2013, 32 familles de la tribu khadia ont été déplacées dans un village en dehors de la réserve et n’ont reçu qu’une petite partie de l’indemnité qui leur avait été promise. S’abritant sous des bâches en plastique sur un petit lopin de terre, la tribu est à présent totalement dépendante des subsides gouvernementaux.
Les médias locaux ont annoncé l’expulsion de décembre en la qualifiant de ‘grand succès’ qui ‘facilitera’ les prochaines relocalisations. Pourtant, les Munda de Jamunagarh ont été horrifiés des conditions de réinstallation et ont déclaré : ‘Nous avons toujours été là. Voir de telles conditions nous brise le coeur. S’il vous plaît, ne nous déplacez pas’.
Selon la loi indienne, le consentement des villageois doit être obtenu et leurs revendications concernant leurs terres dans la forêt doivent être obtenues avant que de telles réinstallations soient mises à exécution. Mais leurs droits sont ignorés et les communautés sont épuisées par le harcèlement et les promesses de compensations financières, alimentaires, territoriales et en bétail – dont la plupart ne se matérialisent jamais.
En tant que premiers défenseurs de l’environnement, les peuples indigènes habitent les régions du monde les plus diverses en matière de biodiversité – et c’est souvent parce qu’ils ont protégé leurs environnements fragiles que la faune a réussi à survivre. Mais les autorités indiennes semblent déterminées à créer des zones libres de toute présence humaine à l’intérieur des réserves de tigres à travers l’Inde.
Stephen Corry, directeur de Survival a déclaré : ‘Les peuples indigènes sont généralement les meilleurs défenseurs de l’environnement. Malgré cela, dans de nombreux endroits à travers le monde, ils sont illégalement expulsés de leurs terres au nom de la ‘conservation’. C’est particulèrement flagrant dans les réserves où les hommes qui ont vécu aux côtés de la faune durant des générations sont chassés pour faire place à des bus de touristes et les routes et infrastructures que cela nécessite. Il ne s’agit en aucun cas de conservation mais bien de tirer profit des terres indigènes’.
Notes aux rédactions :
- Similipal a été déclarée réserve de tigres en 1973. Au cours de plusieurs expulsions qui ont eu lieu entre 1973 et 2013, 3 des 6 villages ont été déplacés de la zone centrale de Similipal. Jamunagarh, Kabatghai et Bakua, les trois villages restants, résistent actuellement à l’expulsion.
- Un chargé de campagne de Survival qui s’est rendu récemment dans cette zone est disponible pour des interviews.