L’extermination d’une tribu andamanaise s’achève après la disparition de son dernier représentant
4 Février 2010
Cette page a été créée en 2010 et pourrait contenir des termes à présent obsolètes.
Le dernier membre d’une tribu des îles Andaman, en Inde, vient de disparaître.
Boa Sr, qui est décédée la semaine dernière avait environ 85 ans, elle était la dernière locutrice de bo, l’une des dix langues andamanaises. On considère que les Bo, qui vivaient dans les îles Andaman depuis 65 000 ans, étaient les descendants de l’une des plus anciennes cultures humaines de la planète.
Boa Sr était la plus âgée des Grands Andamanais, qui ne sont plus que 52 aujourd’hui. A l’origine, divisés en dix tribus distinctes, les Grands Andamanais représentaient une population de 5 000 personnes avant la colonisation britannique des îles Andaman en 1858. La plupart ont été tués ou ont succombé aux maladies transmises par les colonisateurs.
N’étant pas parvenus à ‘pacifier’ la tribu par la violence, les Britanniques tentèrent de les ‘civiliser’ en les capturant et en les enfermant dans un ‘home andamanais’. Sur les 150 enfants nés dans le home, aucun n’atteignit l’âge de deux ans.
Les Grands Andamanais qui ont survécu jusqu’à nos jours dépendent étroitement du gouvernement indien pour leur subsistance et nombre d’entre eux ont sombré dans l’alcoolisme.
Boa Sr qui avait survécu au tsunami de décembre 2004 avait témoigné devant des linguistes : ‘Nous étions tous là au moment du tremblement de terre. Le plus âgé d’entre nous, nous avait avertis: “la Terre va s’ouvrir, ne fuyez pas, ne bougez pas”. Les anciens nous l’avaient dit, c’est comme ça que nous savons les choses’.
Anvita Abbi, linguiste, qui connaissait Boa Sr depuis de nombreuses années, se souvient : ‘Etant l’unique locutrice de bo, elle se sentait très seule et n’avait personne avec qui parler… Boa Sr avait un grand sens de l’humour, sa gaieté et son rire à gorge déployée étaient très contagieux.
‘Vous ne pouvez imaginer la douleur et l’angoisse que j’éprouve chaque jour en étant le témoin muet de la disparition d’une culture remarquable et d’une langue unique’.
Boa Sr avait confié à Abbi qu’elle était heureuse que la tribu voisine des Jarawa, qui n’a pas été décimée, puisse continuer à vivre dans sa forêt loin des colons qui ont envahi une grande partie des îles.
Stephen Corry, directeur de Survival International, a déclaré aujourd’hui : ‘Les Grands Andamanais ont tout d’abord été massacrés puis ils ont été détruits par des politiques paternalistes qui les ont exposés à de terribles épidémies, les ont spoliés de leurs terres et privés de leur indépendance.
‘Avec la mort de Boa Sr et l’extinction de la langue bo, une part unique de la société humaine n’est plus qu’un souvenir. La disparition de Boa est le triste rappel que nous ne devons pas permettre que cela arrive aux autres tribus des îles Andaman’.
Ecouter le chant de Boa Sr en bo